Dessin : Pierre Ficheux
Vidéo : La mode du coaching – Karim Duval, humoriste
https://www.youtube.com/watch?v=HSv6SOKIzwc
Cela fait plusieurs jours qu’un article avec ce titre trotte dans ma tête et voilà que je tombe sur une vidéo du même nom qui illustre très bien et avec humour ce que j’avais en partie à coeur de vous dire ! C’est parfait. 🙂
L’idée d’écrire cet article m’est venue après avoir été contactée trois fois en l’espace de deux jours, comme cela m’arrive sinon régulièrement, par des personnes soit en formation de coaching soit s’apprêtant à s’inscrire à une formation et désirant y voir plus clair sur le métier de coach. Il est vrai que le thème de la posture du coach m’intéresse particulièrement.
J’insiste, le coaching – j’entends le coaching professionnel – est un vrai métier. C’est même un art subtile et complexe, qu’on ne peut pratiquer avec une baguette magique et quelques formules apprises dans les livres américains de développement personnel.
Et effectivement c’est très à la mode. « Aujourd’hui tout le monde peut être coach… avec rien, même pas ton couteau ! », nous dit Karim dans la vidéo. Il y a des coachs en tout et il pointe le fait que les coachs de vie ont remplacé les psys. Une des explications à cela en France serait-elle que la profession de psychothérapeute (à ne pas confondre avec les psychologues issus d’un parcours universitaire) s’est réglementée et que tous ceux qui se contentaient d’une formation de quelques week-ends ne peuvent plus prétendre à ce titre ? Il faut bien trouver autre chose quand on est pressé de faire du business sur les aspirations des gens à moindres efforts. Quoi de mieux qu’une profession encore toute jeune, non réglementée ?
Heureusement cela est en train de changer, un signe en étant que les trois principales fédérations de coaching (ICF, EMCC et SFC), qui s’efforcent depuis plusieurs années de structurer le métier avec des standards exigeants, viennent d’unir leurs voix pour faire reconnaître leurs démarches de professionnalisation auprès de l’Etat français et dans les autres pays.
Attention, cela dit, à part quelques individus peu scrupuleux, la grande majorité des personnes qui embrassent cette voie souhaite sincèrement apporter une véritable valeur ajoutée à leurs interlocuteurs.
Seulement voilà, ont-elles une réelle idée de ce qu’est le coaching professionnel et de ce que cela implique ?
Je suis toujours très étonnée de constater que de nombreuses personnes qui entrent en formation n’ont elles-mêmes jamais envisagé la démarche de se faire coacher, ne serait-ce par exemple par curiosité préalable de savoir dans quel univers elles s’engagent, de vivre ce que leurs futurs clients s’apprêtent à vivre ou encore pour aller connecter de l’intérieur en quoi ce métier résonne pour elles (ou pas), en pure cohérence avec le propos de la voie choisie.
« Vous savez, dans une formation vous allez apprendre un tas d’outils, mais ce ne sont que des outils, intéressants et utiles certes, mais ce qui fera réellement la différence au niveau de la puissance de votre travail, c’est la posture que vous serez allé chercher au fond de vous en vous confrontant à votre propre système, que vous aurez approfondie avec le temps, par exemple en vous faisant vous-même coacher… » Mes paroles sont généralement suivies d’un grand silence… Pour certains (parce qu’ils ont la vocation ?) c’est une très bonne nouvelle qui vient rencontrer leur propre évidence, d’autres bredouillent des excuses pour éviter le sujet, qui a sans doute encore besoin de maturer…
En effet, gare à la désillusion face à l’autre réalité du métier.
Des jeunes coachs me font part de leur amertume, quand ils découvrent par exemple qu’au bout de 6 mois de formation (à distance parfois – no comment), ils ne se sentent absolument pas prêts à coacher, qu’il leur faudra longtemps, voire très longtemps avant d’espérer avoir ne serait-ce que la moitié du salaire qu’ils touchaient en tant que salarié, que les frais sont très élevés (formation continue, supervision, thérapie, affiliation à une fédération…) pour qui veut pratiquer sérieusement, sans parler des frais classiques liés au statut d’indépendant. Ils réalisent après coup que les coachs qui gagnent leur vie ont généralement une autre casquette en parallèle (consultant, formateur…) ou carrément une autre activité (pour financer la première…), à moins qu’ils n’aient écrit un livre ou bénéficient d’un bon réseau auprès des entreprises prêtes à investir dans le coaching, et bien sûr qu’ils soient très bons et prêts à l’assumer, et ça ça se travaille.
Certains prennent aussi conscience que c’est un métier où on est seul la plupart du temps et dans lequel il faut sans cesse se réinventer. Le chemin de l’autonomie, de la responsabilisation, de la cohérence, de l’authenticité, de l’humilité et du dépassement constant est bien celui du coach, puisque ce sont les sujets sur lesquels il accompagne.
Ce n’est pas toujours ce que l’on s’était imaginé…
Alors comment reconnaître un vrai professionnel, habité par la vocation ?
A la PROFONDEUR de sa démarche.
Le professionnel, qui peut tout à fait être un débutant, fait un vrai travail sur lui. Idéalement il a pris du recul sur sa propre histoire par le biais d’une thérapie au long cours, pour ne pas que son vécu vienne s’inviter dans la relation de coaching.
En effet, nous dit encore Karim dans la vidéo : « Y’en a qui font coach par pur narcissisme, qui projettent leurs idées, leurs souffrances sur le client, alors que ça ne lui correspond pas ».
La tentation est très grande de vouloir projeter son histoire sur les autres, surtout lorsqu’on a traversé certaines épreuves et qu’on pense alors avoir trouvé le graal. « Faites comme moi, je sais ce qui est bon pour vous ! »
On retrouve cela auprès de certaines figures du développement personnel.
Certes, nous sommes tous à l’affût des bonnes recettes pour nous épargner des détours inutiles. Et pourtant c’est irrémédiablement dans ces détours, qui nous sont propres, que ce cachent les réponses et les pépites recherchées, dans le fait de connecter l’extérieur à notre propre intérieur. Si le parcours d’une personne peut toujours être une belle source d’inspiration, il n’en reste pas moins que c’est son chemin et vouloir en faire un copié-collé pour connaître la même trajectoire est un leurre.
Ainsi le professionnel sérieux se fait superviser régulièrement pour pouvoir examiner ce qui émerge dans ses coachings avec un autre regard justement, pour permettre à ses clients d’aller plus loin quand leur situation vient toucher ses propres limites.
Il n’hésite pas à aller côtoyer de près ses propres peurs et se confronter à sa vulnérabilité, à l’exposer devant vous, pour vous permettre de faire de même et d’aller chercher les réponses au fond de vous (pas auprès de lui), pour mieux atteindre votre objectif.
Justement il a appris à reconnaître ses propres failles et à oser les utiliser au service de ses clients, car plus il avance dans le métier, moins il a de certitudes. Il se rend compte que le savoir n’est rien vis à vis de l’être. Et l’être se façonne avec le temps, dans la reconnaissance de notre entièreté, nos parts d’ombre comme de lumière. Pas toujours très confortable…
Même s’il est débutant, vous le reconnaîtrez, car justement lui il sait (ou du moins pressent) qu’il ne sait pas, que vous savez mieux que quiconque ce qui est bon pour vous, et même et surtout après des années d’expérience. En toute humilité et transparence, il est prêt à vous offrir ce cadre professionnel qu’il découvre lui-même comme si important et qui vous permettra de grandir. Dès le début, il ne cherche pas sa propre performance, mais il se tient avec vous, prêt à vous tendre le miroir, ce miroir qu’il connaît bien, pour vous permettre de cheminer vers votre objectif, ses imperfections au service des vôtres, avec le soutien de ses pairs plus expérimentés en toile de fond. .
C’est ainsi un réel partenaire qui est présent à vos côtés, qui vous donne l’espace que vous êtes venu chercher pour vous écouter et vous entendre. Et vous le sentez.
En conclusion, pour reprendre les mots de Karim : « Si tu fais ce métier parce que tu as une expérience conséquente, un vécu et un recul dessus, un vrai sens de l’empathie et de l’écoute, si tu as vraiment envie de faire réfléchir les gens plutôt que de leur donner des recettes toutes faites pompées dans un bouquin de développement personnel venu tout droit des US, OK fais coach. Sinon, respecte la profession et prends un coach ! »
Merci Karim ! 🙂
Sylvie Filipski,
Coach professionnelle PCC, multilingue, certifiée ICF
Mentor Coach ICF
www.perspektives.fr
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